← Retour Publié le

5 QUESTIONS À… Laurence et Chris, autrices historiques

De gauche à droite, Laurence Paix-Rusterholtz et Chris Lavaquerie-Klein.

Au départ, Laurence Paix-Rusterholtz est historienne de l’art et médiatrice culturelle, et Chris Lavaquerie-Klein chargée d’enseignement en communication culturelle et muséologie. Leur rencontre, à Paris en 1986, va changer la donne des deux futures autrices prolifiques. Petites, déjà, l’une voulait refaire le monde, rêver et lire lire lire, et l’autre envisageait déjà l’amitié comme un précieux trésor. Une belle histoire qui a permis d’en écrire plusieurs. Et ce n’est pas fini!

1) Vos dizaines de livres sont édités par plusieurs maisons d’édition, et certains sont traduits en coréen, en chinois et en portugais. Vous réalisez des jeux et avez collaboré à des revues pédagogiques, également créé une agence de médiation culturelle en 1999. En 2024, vous allez publier chez ASJ Les Objets dans l’Histoire, La Préhistoire expliquée aux enfants chez Larousse et, à l’automne, Nathan éditera un livre sur la mythologie japonaise. Vous êtes accros au boulot?
Laurence: Accro au boulot? Accro à CE boulot, c’est sûr! L’art, l’Histoire, les civilisations et les peuples du monde, c’est passionnant et un peu addictif. J’ai besoin de voir des expos, de lire, d’écouter des conférences, ça me nourrit, m’enrichit. Et, ensuite, j’aime partager mes découvertes. Nos livres, fruits de nos échanges avec Chris, c’est le plaisir de la transmission. Notre agence de médiation culturelle l’Ibis et l’allégorie, dont nous fêtons en 2024 les 25 ans, promeut l’art comme vecteur émotionnel de découverte et d’apprentissage, l’art sous toutes ses formes pour permettre aux jeunes de porter un regard innovant sur le monde et la société. Donc oui, accro au boulot!
Chris: J’aime beaucoup travailler oui, mais sans être exagérément «accro». Je serais plutôt accro à la transmission, qu’elle soit écrite bien sûr, mais aussi orale (j’ai longtemps été enseignante en communication culturelle). Le fait d’être passionnée par les découvertes archéologiques, scientifiques et l’univers artistique est un moteur puissant. Il procure beaucoup d’énergie pour explorer ces disciplines, les comprendre, puis les vulgariser. Mais il est vrai aussi que ce «boulot» d’autrice et médiatrice donne tellement de satisfactions, qu’il peut avoir un côté addictif. ;-)

2) Votre première collaboration date de 2002. Vous pouvez nous raconter comment vous êtes-vous rencontrées?
Laurence: Nous nous connaissons depuis 1986 et l’ouverture de la Halle Saint-Pierre à Paris, animée par le Musée en Herbe. Je travaillais au service jeune public comme médiatrice culturelle, et Chris était chargée de la communication. L’entente a été immédiate avec un grand respect du travail de chacune. Et de nombreux fous rires mémorables! Ce qui a joué un grand rôle dans notre décision de nous associer quelques années plus tard.
Chris: Dans les années 1985, nous travaillions ensemble dans deux musées associatifs de la ville de Paris, le Musée en Herbe et la Halle Saint-Pierre. Laurence était responsable du service de la médiation culturelle, et moi responsable de la communication et des relations extérieures. Notre amitié s’est nouée à ce moment-là. Nous avions une grande connivence et l’envie de travailler de façon plus indépendante, plus libre. Nous avons décidé de créer une agence d’action culturelle ensemble en 1999 (l’Ibis et l’allégorie). La belle aventure s’est poursuivie, ensuite, avec l’écriture jusqu’à aujourd’hui.

3) Comment travaillez-vous ensemble, qui fait quoi, comment et à quel rythme?
Laurence: Lorsqu’une idée émerge, qu’elle soit émise par l’une ou l’autre ou qu’elle s’impose à nous au même moment –souvent, d’ailleurs, quand nous travaillons sur un projet qui nous ouvre de nouvelles perspectives–, nous approfondissons cette idée, imaginons quelle forme elle peut prendre dans un livre, écrivons ensemble un argumentaire ou un synopsis et une ou deux pages test. Quand le projet est accepté par un éditeur, nous nous répartissons les différentes pages. Un travail plus solitaire commence alors: recherches documentaires, premiers textes. Puis nous nous retrouvons pour retravailler les textes, les lisser, les relire jusqu’à être totalement satisfaites du résultat, et nous n’avons pas toujours le même timing sur ce point! Alors on lit, on relit et on lit encore jusqu’à être parfaitement en accord.
Nous travaillons plus souvent ensemble que séparément. Le confinement (et ses suites) nous a confortées dans le fait que nous avions besoin de nous voir pour que les idées fusent, le seul contact téléphonique ou en visioconférence ne nous suffisaient pas.
Chris: Les propositions d’ouvrages naissent soit d’un dialogue entre nous, soit de réflexions personnelles mises en commun. Lorsque les contours d’un livre sont définis, nous bâtissons toujours ensemble le synopsis, un premier découpage des thématiques, des chapitres. Viennent ensuite les échanges avec l’éditeur, les ajustements, puis nous nous répartissons les textes. Une fois rédigés en solo, nous les retravaillons en duo devant l’écran. Il est indispensable d’harmoniser tous les textes de façon à proposer une lecture homogène.
Le rythme de travail est le plus souvent «imposé» par la maison d’édition en fonction de sa programmation. On s’adapte…

4) Passionnées d’histoire, vous transportez le public jeunesse et celui adulte dans d’autres temps. Avez-vous vous-même beaucoup voyagé?
Laurence: Pas autant que j’aimerais le faire! Et, aujourd’hui, notre impact carbone nous fait réfléchir sur notre manière de voyager. Mais je conserve l’envie de découvrir l’histoire des pays visités. Et quelle joie de voir dans les collections des musées visités des œuvres sur lesquelles nous avons travaillé!
Chris: Le voyage peut s’entendre de plusieurs façons: l’intérêt pour l’archéologie, les mythes, l’histoire de l’art, tout cela fait en effet voyager dans le temps. En plus de ces passionnantes explorations intellectuelles ou livresques, j’ai effectivement la grande chance de voyager souvent. Là, je crois que je suis «accro» pour reprendre votre terme.
Un des mots de la langue française que je préfère est circumnavigation. [C’est un voyage maritime autour d’un continent, NDLR.]

5) Y a-t-il un projet qui vous tient à cœur, mais que vous n’avez pas encore eu le temps de réaliser?
Laurence: Nous avons imaginé une histoire de l’art, ludique, «en toute liberté». Je rêve que ce projet se réalise, comme une synthèse entre ma passion pour l’art, ma formation et ma vie professionnelle. Nous avons encore bien d’autres projets dans nos cartons, qui verront le jour, je l’espère, dans les mois à venir!
Chris: Oui, et pas qu’un: plusieurs! Sur le plan professionnel, ils touchent à l’écriture bien sûr avec ma chère complice. Nous avons en projet une histoire de l’art ludique qui nous tient particulièrement à cœur. Et sur le plan personnel, j’ai une longue bucket list. ;-)
[C’est la liste des choses qu’on veut réaliser au cours de sa vie, NDLR.]
propos recueillis par
Carmelita del Sol

En savoir plus
Retrouvez dans notre rubrique Ivres de livres, la présentation de leur magnifique ouvrage Un dieu sur deux est une déesse, illustré par Clémence Pollet et publié chez Nathan en juin 2023.