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À ÉGALITÉ Rugby: l’USO Massif central «casse les bulles sociales» à Paris

Les joueuses de la saison précédente lors d’un stage cadettes à Marcoussis, en région parisienne, où elles ont croisé quelques joueuses du XV de France.

Véritable carrefour d’échange entre apprenti.e.s du rugby, le club parisien de l’USO Massif central est un parfait exemple du formidable outil d’intégration que le sport peut offrir. Le club favorise la mixité de jeunes joueuses et de joueurs d’origines géographiques et sociales différentes par des liens forts autour de ce sport passion.

Une brise glaciale gifle les visages rougis par le froid. Pas de quoi décourager les minots de l'école de rugby, plus ou moins réveillé.e.s et habiles de leurs mains, en cette matinée automnale. «Vous prenez chacun.e un ballon et vous devez réussir à aller jusqu’ici, à l’abri dans la base, indique en montrant un cerceau l’éducatrice en baby rugby, Magda, 18 ans. Et sans vous faire attraper par les loups», plaisante-t-elle. Il ne s’agit là que d’un aperçu de l’intense fourmilière de passionné.e.s de tous âges, qui se donnent rendez-vous presque tous les dimanches sur ce terrain du Stade Carpentier. Ici, nichée entre les épaisses tours du quartier des Olympiades, dans le 13e arrondissement de Paris, s’est installée depuis quelques années l’Union Sportive Olympiades Massif Central (USOMC), «Massif» de son surnom.

«On a des gens qui viennent de partout, de Paris et de banlieue, mais aussi des régions»

Un dimanche classique pour une association sportive, pourtant cet USOMC, club «à l'image de l’arrondissement», selon Sven, dirigeant, se démarque particulièrement par la diversité de profils de ses membres. «On a des gens qui viennent de partout, de Paris et de banlieue, mais aussi des régions, qui sont soit montés pour le travail ou leurs études», expose-t-il en ouvrant la terrasse du club house, qui accueillera bientôt les apprenti.e.s rugbymen et women, pour déguster un verre de chocolat chaud.

Dans le lot, une flopée de supporters de l’ASM Clermont, forcément, et d’individus plus ou moins jeunes ayant des attaches en Auvergne, région originelle des créateurs du club, dont la première version est née en 1922. D’ailleurs, le président est auvergnat et la vice présidente, elle, vient du Cantal. «Mais cela n’a jamais été un objectif de rester entre nous, au contraire», glisse le premier, Géraud, entre deux poignets de mains en tribunes.

Et le club sait y faire quant il s’agit d’accueillir les nouveau venus.«Une grande communauté de notre île est présente à Paris, indique Micka, joueur, puis entraîneur et responsable sportif du club, originaire de Futuna. On m’a conseillé de venir ici, se souvient-il. Dès le premier jour, un ancien est venu me parler, m’a demandé d’où je venais… Ce n’est pas le cas partout. L’accueil est très important pour nous et, là, c’est bien simple: je ne suis jamais parti, ma femme est investie elle aussi au club, et notre fils y joue.»

L’engagement social comme moteur qui devient une histoire familiale

Les histoires de familles désormais incapables de quitter le club, certaines ayant découvert le rugby et le club plus ou moins par hasard et qui se trouvent pleinement investies dans le jeu, l’éducation ou la direction, sont pléthores au club. Il y a Fernando, venu de Madrid, dirigeant, et ses trois enfants licenciés au Massif. Et puis il y a Magda, joueuse et éducatrice, dont le papa d’origine chilienne est entraîneur et préparateur mental, ou encore Mérédith, franco-galloise, joueuse et aussi éducatrice pour les touts-petits, et dont le frère a été joueur au Massif avant de rejoindre le Stade Français. «Presque tout le monde a une double casquette ici, et on est présent presque tous les jours. C’est qu’on y est bien», confie Fernando dans un sourire avant de se concentrer sur le terrain où l'un de ses fils va commencer un match. «Les gens du club observent les parents, qui viennent au bord du terrain, semblent curieux, et ils te proposent de venir participer à une chose ou à une autre… Et tu finis accroc», rit-il.

«Ces échanges-là, cette solidarité, cette richesse, c’est ma plus grande fierté»

«Au-delà du côté sportif et de voir ce club continuer à se développer, l’une de mes plus grandes fiertés c’est de voir se mélanger des gens de milieux différents, qui ne se seraient très probablement jamais croisés sans le rugby», ajoute le président du club. « On a des jeunes qui ont fait HEC, d’autres qui n’ont pas le bac, certains qui travaillent, d’autres qui font des études», complète Sven. «C’est génial de pouvoir se dire que si l’un d’eux veut se lancer, monter son entreprise ou autre, il pourra compter sur un copain du rugby pour l’aider», poursuit le président.

Une philosophie que le club développe aussi en s’inscrivant pleinement dans la vie du quartier. «Certains éducateurs interviennent dans des écoles pour initier les jeunes au rugby. On a aussi mis en place de l’aide aux devoirs. Pouvoir accompagner des jeunes tout en promouvant les valeurs du rugby est très important pour nous. Certain.e.s sont arrivé.e.s comme ça au club», confirme Christine, vice-présidente. La conclusion revient au président: «Ces échanges-là, cette solidarité, cette richesse, c’est ma plus grande fierté. Ce sont des gens qui évoluent dans des bulles sociales totalement différentes, souvent hermétiques, se dire qu’on les casse grâce au rugby, c’est le plus important».

Justine Saint-Sevin