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BIEN-ÊTRE Le cacao, maître de cérémonie

Ex-Parisienne surmenée, Sandra Marinelli est accompagnatrice holistique et vit dans le sud de la France. Formée par deux Canadiennes au rituel du cacao, elle nous explique comment elle prépare la boisson sacrée des Aztèques selon un savoir-faire ancestral pratiqué au Guatemala. C’est le sujet détente de cette édition, que j’ai testé pour vous!

Les Aztèques le dénommaient le plus bel arbre du Paradis. Sandra, comment en es-tu arrivée à célébrer le fruit du cacaoyer?

Ça a commencé par un rêve. Tout ce que j’entreprends depuis des années me vient comme ça, par intuition ou pendant la nuit. Je porte beaucoup d’attention à mes ressentis. J’ai rêvé d’une boisson. Le lendemain matin, sur les réseaux sociaux, j’ai vu passer des images de personnes qui en versaient dans des récipients. C’était exactement comme dans mon rêve! J’ai compris que j’avais rêvé du cacao. Alors, j’ai commencé à me renseigner, ignorant totalement que c’était une plante utilisée depuis des millénaires pour ses propriétés bienfaisantes tant d’un point de vue physique que psychique, pour un voyage intérieur. C’est comme ça que j’ai découvert le cacao.

Depuis quand pratiques-tu la cérémonie du cacao?

Depuis plus de deux ans. Quand j’ai découvert la merveilleuse histoire de ce petit arbre qu’est le cacaoyer [également appelé cacaotier, NDLR] et l’existence des cérémonies, j’ai souhaité assister pour la première fois à la célébration de son fruit.
C’était juste après le début du covid. Grâce à Internet, j’ai pu bénéficier d’une transmission par deux Canadiennes, Geneviève Locas et Julie Scalune, qui connaissent très bien ces familles qui travaillent le cacao de façon ancestrale, notamment au Guatemala. Nous étions réunies par écrans interposés, dont des familles qui ont pu nous faire vivre cette cérémonie du cacao et nous en transmettre les bases. Comme celle de la Guatémaltèque Izaias S. Mendoza.
De mon côté, je guide des séances de cacao cérémoniel depuis maintenant un an et demi.

D’où vient et qui fabrique la pâte que tu utilises?

Je trouve important de rappeler que la provenance des fèves et l’éthique selon laquelle est travaillé le cacao sont très importantes, car il y a différents types de cacao. Je me suis approvisionnée en pâte de cacao via le site guatématèque Cacao Source. Depuis plus d’un an, je passe par Ruk’u’x Ulew, du nom du collectif de femmes mayas au Guatemala, qui travaillent leur cacao avec énormément de respect. Tout est éthique dans cette histoire. Et je sais que ces femmes-là ne sont pas sous-payées.

Comment se déroule la préparation de ce précieux liquide, comment tu fais?

Le plus important est de maintenir le cacao aussi brut et pur qu’il l’est. Je le prépare en coupant au couteau la quantité de cacao que j’ai besoin d’utiliser. La dose ancestrale pour le cérémonial est de 40g [dosage pour une personne adulte, NDLR]. Le but est de pouvoir se connecter à l’esprit de la plante. Beaucoup de cultures transmettent ces croyances selon lesquelles tout ce qui existe sur terre possède un esprit. On peut bien sûr utiliser moins de 40g. C’est un dosage qui me convient, car je ressens alors vraiment tous les bienfaits du cacao, aussi bien physiques que psychiques.
Avant de le couper, je mets à chauffer l’équivalent d’une tasse d’eau à feu très doux. J’y mets ensuite le cacao, que je fais fondre dans l’eau, et j’ajoute un sucrant naturel comme du sirop d’agave ou du miel. Dans tous les cas, quelque chose de naturel pour ne pas brusquer la plante. Et par respect, tout simplement. On peut aussi utiliser des épices. Par exemple, j’aime bien ajouter de la cannelle, de la cardamome ou du piment. Une fois le cacao fondu, il faut compter une dizaine de minutes avant de le consommer. Pendant ce temps, j’attends «en conscience», puis je le bois de la même façon. [La pleine conscience est une méthode de détente qui consiste à prêter attention au moment présent de façon introspective et sensorielle, NDLR.]

En parlant de conscience, qu’est-ce que tu ressens quand tu confectionnes cette boisson sacrée?

Enormément de gratitude. On dit que c’est une plante qui ouvre le cœur, une «médecine du cœur». Déjà, elle augmente le rythme cardiaque. En effet, on sent qu’on a davantage de pulsations. Côté spirituel, c’est une plante qui m’a aidée à revenir dans un état d’humilité, de respect total du vivant. Sa puissance m’a fait réaliser qu’on n’est pas au-dessus de la nature: on en fait partie. Quand je prépare du cacao, c’est comme si je me connectais de nouveau à tout ce qui m’entoure avec amour.

Tu évoquais les bénéfices liés au cacao. On sait qu’il contient beaucoup de magnésium. Pour les bienfaits psychiques, ça se traduit comment?

Oui, il contient beaucoup de magnésium. Le cacao est, avec les vitamines et les minéraux qu’il renferme, un des plus riches antioxydants qui existent. Celui dit «cérémonial» est un cacao pur à 100%. Et par la façon dont il est cultivé, travaillé et réduit en pâte (pâte de cacao et beurre de cacao), on détient vraiment toute la synergie de la plante. Elle contient une molécule qui s’appelle la théobromine, qu’on retrouve dans très peu de cacaos vendus dans le commerce. Cette molécule vient réactiver les hormones du bonheur et de la joie présentes dans notre cerveau. C’est pour ça que, lorsqu’on boit ce cacao cérémoniel, on le ressent grâce à la sérotonine [un neuromodulateur, NDLR], à la dopamine [un neurotransmetteur, NDLR] et à la norépinéphrine [également appelée noradrénaline, c’est un neurotransmetteur du système nerveux sympathique, NDLR]. Voilà pourquoi on ressent beaucoup de joie, de bien-être pouvant aller jusqu’à la béatitude, lors d’une cérémonie. Nos sens se décuplent, comme si les couleurs étaient encore plus belles ou les sensations de toucher plus intenses: la pleine conscience est là. On est en éveil et vraiment dans l’instant.
On peut vivre ce moment comme ça, ou aller encore plus loin vers un voyage intérieur, surtout si on est guidé.e par une personne qui maîtrise cette pratique. Ça peut être très agréable de fermer les yeux et de «voir» ce que le fruit de cet arbre suscite en nous. C’est en ce sens que je parlais tout à l’heure de bien-être spirituel, car par ses propriétés, le cacao aide à avoir ce cheminement. Ça peut éclairer pas mal de points quand on se sent perdu.e ou simplement nous apaiser, nous conférer de la confiance et de l’amour. Quand la vie est dense, cela aide.

Comment se déroule une célébration?

Chaque cérémonie est différente, parce que c’est lié aussi à l’énergie de chaque participant.e. Lors d’une cérémonie du cacao, on est assis.e en cercle. Le but de la célébration est d’honorer cette plante. Lors de la transmission chamanique, on peut aussi convier en esprit les autres éléments. On va se donner un temps méditatif pour «se poser» dans ce moment, à cet instant. On entend souvent: «On boit le cacao après deux heures de cérémonie.» C’est vrai! Le but est de nous ramener à une certaine patience et à une conscience totale. Quand on utilise une telle plante dans le respect du vivant, on prend le temps de l’honorer, de la célébrer, et de l’accueillir. On ne doit pas se dire «vite vite vite!» et avaler rapidement son cacao avant d’aller travailler, par exemple. Non, pour accéder à une certaine conscience, il nous faut ralentir, prendre le temps d’être guidé.e dans la respiration, par des sons et des mouvements.
On chante beaucoup dans les cérémonies du cacao. Ça fait du bien de s’y remettre, et ça nous rappelle combien notre outil vibratoire est puissant. Après cette ouverture du cœur et de l’esprit, on consomme le cacao en pleine conscience. Et puis, on peut «déposer» aussi une intention dans sa tasse. D’ailleurs, c’est un exercice qu’on peut faire au quotidien avec d’autres boissons. On peut tout à fait déposer une intention en buvant un verre d’eau, un café, un thé, une tisane. Une cérémonie telle que celle du cacao amène à faire les choses en conscience, voilà pourquoi chaque geste a son importance.
Une fois qu’on a bu notre cacao ensemble, on poursuit l’expérience de diverses façons: en mouvement, par des danses par exemple, ou du dessin. Ça peut s’avérer très créatif d’utiliser du cacao, peinture au doigt sur soi, sur le visage d’un.e des participant.e.s, ou sur un support comme une feuille de papier, le cacao remplaçant la peinture. En groupe, ça peut donner une réalisation collective. On peut aussi, selon les envies, peindre chacun.e de son côté. Au final, chaque personne vit comme elle le souhaite. Dans tous les cas, ça reste un merveilleux voyage intérieur, qu’on partage avec les autres.

Tout à l’heure, tu parlais des éléments. Est-ce préférable de célébrer le cacao en plein air?

Je ne dirais pas que c’est mieux ou moins bien. Je suis intimement persuadée que même si on se trouve dans un appartement en ville on peut, grâce à la visualisation intérieure, «connecter» avec tous les éléments avec lesquels on est en lien. La Terre est symbolisée par notre chakra racine [situé au niveau du périnée, c’est le point de l’énergie vitale et spirituelle, NDLR]. L’élément de l’Eau est localisé dans notre bassin, berceau de nos émotions. Le Feu est localisé au niveau du plexus, il permet de s’affirmer, de rayonner et de mettre ses projets en action. Pour l’élément de l’Air, le vent, cela se situe au niveau de nos poumons et du cœur. Même si on n’est pas en pleine nature, on peut s’y connecter.

Qui peut boire de ce breuvage cérémoniel et à partir de quel âge?

Parce que ça vient accélérer le rythme cardiaque, ce n’est pas recommandé aux personnes qui ont de l’hypertension. Idem pour celles qui prennent des antidépresseurs, car le cacao en est déjà un naturel. Donc ça peut annuler les effets du médicament. Comme le café, il est également déconseillé aux femmes enceintes. Pour ce qui est de l’âge, il faut savoir que dans certains pays des tout-petits en boivent, c’est juste qu’il ne faut pas qu’elles et ils en boivent 40g!
Cela dit, un dosage de 40g peut s’avérer trop fort pour une personne adulte. Cela dépend. La seule chose à savoir est que moins on met de cacao, plus il sera dilué dans l’eau, et moins il sera fort, donc, puissant. Attention, c’est faisable de préparer sa mixture avec 20g de cacao. Il suffit de se connaître et de s’écouter. Et pour une personne qui n’aime déjà pas les excitants, c’est simple: elle n’en boit pas.

Quelque chose à ajouter?

J’ai envie de remercier ces familles qui partagent leurs cultures du cacao, parce qu’en France on ne le cultive pas. C’est bien de pouvoir découvrir et de transmettre ces savoir-faire naturels et ces recettes médicinales avec beaucoup d’humilité, de respect et de gratitude pour un moment d’union avec d’autres personnes du monde. Je trouve ça très riche, parce que ça nous montre ce qu’il se passe sur notre belle planète, et ça nous rappelle aussi que la Terre dispose d’une grande variété de plantes, de fleurs, de végétaux,… dont les qualités restent méconnues.
Pour finir, bien entendu, nous cultivons en France des plantes dont nous ignorons quelquefois les propriétés. Mais, si nous prenons le romarin, le thym ou encore la sauge, il y a déjà de quoi faire. Tiens, ça me fait penser que je dois poursuivre mes recherches sur le sujet.

Propos recueillis par Claudine Cordani

En savoir plus sur le site de Sandra

J’ai moi-même testé cette pratique au printemps 2022. Nous étions un groupe de 8 femmes accueillies par Sandra le temps d’un court séjour dans le sud de la France. La cérémonie du cacao a été l’un des temps forts de ce moment de partage qui s’est déroulé dans une bienveillance totale du début à la fin. Pendant ces trois jours, nous avons beaucoup échangé sur des sujets très divers, et sommes reparties «riches» de quelque chose d’intérieur. Qui nous accompagne toujours, d’ailleurs. Nous sommes restées en contact et nous nous donnons régulièrement des nouvelles. A chaque fois, cela ravive ces bons souvenirs et fait un bien fou.
En plus de la curiosité qui m’a poussée à m’offrir ce moment paisible dans une vie de luttes et dans une période agitée, je ressentais le besoin de prendre du recul et de me recentrer. Cela a été d’un bénéfice personnel sans nom. J’ai réalisé que le métier qui m’avait quittée quelques années auparavant me manquait, et que j’avais encore des choses à y faire.
Contre toute attente, après une rencontre journalistique et d’autres discussions, je suis revenue au journalisme quelques semaines plus tard avec la création et le lancement de ce journal numérique qui, hormis du temps, de l’énergie et divers savoir-faire, ne m’a quasiment rien coûté. En septembre 2022, le premier numéro des Cent Plumes était en ligne!
Pour finir, je précise que j’ai payé ma place comme les autres participantes. Que d’avoir traité ce sujet n’a pas d’autre but que de vous faire connaître cette pratique. Il est important de savoir que, si beaucoup de personnes disent mener des cérémonies du cacao (ou autres), il s’y trouve des charlatans qui n’ont pas d’autres objectifs que de soutirer de l’argent. Voilà pourquoi je n’ai pas souhaité aborder l’aspect financier. Je vous laisse comparer les tarifs des personnes qui proposent une cérémonie du cacao, et vous renseigner également par le bouche-à-oreille auprès de personnes y ayant déjà participé, en qui vous avez confiance et dont vous connaissez les valeurs.
C. C.