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SÉRIES MANIA 2023 Les 3 pépites du festival attendues avec impatience

Latecomers, Split, Sous contrôle,… Cette année encore, le meilleur des séries à venir était projeté en avant-première à Lille, dans le cadre du festival international Séries Mania qui s’est tenu en mars. Sur place, nous avons été particulièrement séduit.e.s par trois séries, que nous vous présentons ici.

Que ce soit dans ses lieux culturels ou dans ses rues, Lille a été, plus que jamais cette année en mars, le théâtre de la mise en avant de différentes visions de la société. D’une part, avec Séries Mania, festival international et annuel de séries visité par environ 85 000 personnes cette année –un record! De l’autre, avec des rassemblements quasiment quotidiens contre la réforme des retraites sur les principales places de la ville du Nord. Les deux ont même pu se croiser ici et à l’occasion de plusieurs événements du Festival. Parmi la cinquantaine de séries sélectionnées provenant de vingt-quatre pays, trois ont attiré notre attention cette année.

Latecomers, un manifeste pour le désir de tous les corps
Frank (Angus Thompson) et Sarah (Hannah Diviney), deux jeunes atteints de paralysie cérébrale et tous deux en fauteuil, se rencontrent par hasard dans un bar. Les premiers échanges sont timides, à la différence de leurs soignants, Elliot (Patrick Jhanur) et Brandi (Miriama Smith), qui couchent rapidement ensemble. Amené.e.s à se revoir, Frank et Sarah se mettent à questionner leur rapport au corps et à l’explorer, revoyant ensemble leur notion du couple et de la sexualité, mais pas que.
Loin des représentations pathologiques de corps souffrants et des vécus des personnes en situation de handicap qui nous sont souvent données à voir –pour les rares représentations de ces personnes qui existent dans la fiction–, cette comédie dramatique australienne se révèle aussi revigorante qu’une bouffée d’oxygène. Ici, on nous rappelle que les personnes handicapées peuvent désirer et être désirables, de même que rien ne les cantonne à avoir des relations sentimentales ou des rapports sexuels uniquement avec d’autres personnes handicapées. Des évidences certes, mais qui sont hélas encore loin de l’être pour tout le monde. Chose rare en fiction, la série va même jusqu’à nous montrer et à érotiser des corps nus de personnes en situation de handicap, également représentées en plein acte sexuel. Parmi les personnes à l’origine de ce projet, Angus Thompson et Emma Myers se trouvent en situation de handicap. Aucun validisme donc, et nous sentons tout de suite la différence!
Latecomers, une mini-série d’Angus Thompson, Emma Myers et Nina Oyama, 6 x 10 minutes (quatre épisodes diffusés à Séries Mania). A voir sur SBS (Australie) ou CBC (Canada), pas de diffuseur, pour l’heure, en France. Bande-annonce à découvrir ici.

Split, l’invitation à une «utopie heureuse», poétique, féministe et inclusive
Sur le tournage d’un film, Anna (Alma Jodorowsky), cascadeuse, et Eve (Jehnny Beth), la star du film qu’elle double, ont un coup de foudre l’une pour l’autre. Alors qu’Anna se pensait heureuse dans son couple avec son compagnon Natan (Ralph Amoussou), avec qui elle envisageait d’avoir un enfant, la jeune femme se sent désormais perdue. Quitter Natan pour Eve ne reviendrait pas simplement à entamer une nouvelle relation, mais à sortir du modèle hétérosexuel promu par la société. Anna en aura-t-elle le courage?
Après s’être illustrée, ces dernières années, par ses écrits qui analysent sous un prisme féministe les représentations des sexualités féminines dans les films et les séries, la critique et autrice française Iris Brey ose pour la première fois passer derrière la caméra et proposer sa propre série. Et nul doute que cette romance lesbienne saura parler à un large public, que vous soyez à la recherche de représentations LGBT+, que vous aimiez simplement les histoires d’amour (la culture du consentement en prime), que vous souhaitiez enrichir votre culture de références féministes (dont la mini-série est truffée), ou bien que votre âme cinéphile soit sensible aux détails et aux clins d’œil poussés qui sont rendus au septième art (notamment le recours et le subtil jeu autour du split screen [écran divisé] tout au long des épisodes, qui apporte un vent de fraîcheur à l’écriture ainsi qu’à la réalisation d’une fiction). Bravo les lesbiennes!
Split, une mini-série d’Iris Brey, 5 x 20 minutes (trois épisodes diffusés à Séries Mania). A découvrir prochainement sur france.tv slash (France Télévisions).

Sous contrôle, en politique aussi l’enfer est pavé de bonnes intentions
Femme de terrain, volontaire et populaire, Marie Tessier (Léa Drucker), directrice d’une ONG dans l’humanitaire, se voit proposer le poste de ministre des Affaires étrangères, qu’elle accepte. Le jour même de sa nomination, cinq citoyens européens, dont deux Français, sont pris en otage au Sahel par des terroristes. Marie, qui fait de ce premier dossier une affaire personnelle, ne tarde pas à déchanter en découvrant la complexité voire l’absurdité des codes politiques et de sa fonction. Tout est sous contrôle… vraiment?
Nul doute, en tout cas, que la réalisation et l’interprétation sont sous contrôle dans cette série politique française, qui tire son épingle du jeu en proposant une représentation à la fois crédible et critique de la politique, tout en étant décalée. A travers le personnage qu’elle incarne, Léa Drucker parvient à remettre un peu d’humanité dans la politique et nous rappelle que, face à la multitude d’acteurs à satisfaire et d’enjeux à prendre en considération, influencer les comportements et impacter les vies de personnes à l’échelle d’un pays, voire au-delà des frontières, est bien plus simple à dire qu’à faire –d’autant plus qu’il ne faut pas confondre impuissance et incompétence.
Sous contrôle, une mini-série de Charly Delwart, 6 x 30 minutes (trois épisodes diffusés à Séries Mania). A découvrir prochainement sur Arte.
Thomas Pouilly